Junior Wells – « Hoodoo Man Blues »

junior_wells-hoodoo_man_-blues Junior Wells
Hoodoo Man Blues

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Enregistrement : 22 et 23 septembre 1965 – première parution : janvier 1965 label : Delmark – personnel : Junior Wells (voix, harmonica), Buddy Guy (guitare), Jack Myers (basse), Billy Warren (batterie)

Chicago, 4801, South Indiana Avenue. C’est la fermeture. Tous les clients sont partis. Au fond de ce long couloir encombré de chaises hétéroclites qu’est le Theresa’s, vous êtes assis au bar, perché sur un tabouret bancal. En vous penchant un peu vous pourriez attraper cette cigarette qui se consume, oubliée par le bassiste, en équilibre sur le bord du petit combo noir dont la membrane ébroue l’air moite. Les quatre musiciens ne s’occupent ni de l’heure ni de vous, dans cette salle rendue minuscule sous son plafond bas, depuis que le brouhaha l’a désertée. Maintenant c’est leur truc à eux, une dernière tournée, pour le plaisir.

Enveloppés d’une fumée bleue que dérangent à peine les pales du ventilateur en rotation lente, ils ont baissé un peu la sono et rentré les griffes. La serveuse vient juste de boucler le tiroir à flingues et s’occupe maintenant de mettre de l’ordre dans une forêt de bouteilles. Aux murs douteux, des reproductions de Carroll Doyle, une guirlande d’un ancien Noël qui court au dessus de photos en noir et blanc de Muddy et du Wolf. Le videur allume une cigarette. Il va attendre encore un peu pour ranger la salle.

C’est à ce moment-là que l’attaque à la charleston lance « Sctratch It Back And Hold iI » et fait vibrer les deniers glaçons de votre Crown Royal……

Voilà à quoi vous invite un des albums les plus saisissants que le blues nous ait donné. Pas forcément par hasard d’ailleurs. On est en 1965, et du côté de Chicago ce « Hoodoo Man Blues » est quasiment le premier vrai « Long Player » jamais enregistré. Quant à Junior Wells, c’est la première fois que lui se trouve en studio en tant que leader.

Stimulé par ce temps de jeu inespéré et une envie d’en découdre longtemps bridée, l’ancien sideman de Muddy Waters lâche ici les chiens sur douze titres nickel chrome enregistrés aux petits oignons par l’équipe Delmark. Faut dire que leur patron, Bob Koester, est un fan de Wells et que cette séance il l’a voulue plus que tout, sans ce soucier des ventes. Wells a pu choisir ses musiciens et ses titres. Aujourd’hui, il n’y a personne pour le regretter.

Une acoustique magique, une atmosphère palpable et quatre types déterminés qui gardent leur calme tout au long d’un orage de plus de 45 minutes. La West Side attitude dans toute sa classe.

 

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